Élément incontournable de la candidature, le CV pourrait bien perdre ses lettres de noblesse. Peaufiné par les candidats et expédié par les recruteurs, à l’heure où les entreprises rencontrent des difficultés à recruter, l’utilité du CV est remise en cause. Pour trouver la perle rare, certaines organisations choisissent alors de s’en affranchir.

Concrètement, qu’avons-nous à reprocher au CV ? Quels sont les bénéfices du recrutement sans CV ? Et quelles sont les alternatives existantes ? Cap sur le sujet.

Le CV, un condensé de défauts ?

L’architecture d’un CV est toujours la même. On y trouve les coordonnées du candidat (souvent) accompagnées d’une photo, les expériences professionnelles passées, les diplômes obtenus et pour finir, une brève liste des savoir-être qu’il possède avec un aperçu de ses passe-temps et hobbies. C’est à partir de ces informations que le recruteur décide du sort d’une candidature. Or, selon Stéphanie Reniers, CEO de Gentis, c’est un procédé qui a ses limites en plus d’être risqué, car les biais cognitifs sont nombreux :

“Par exemple, parce que le candidat a fait ses études supérieures dans la même école ou qu’il pratique le même sport, le manager qui recrute va ressentir de la sympathie et penser qu’il aura les mêmes atouts et qualités que lui pour réussir. Ce biais appelé biais de similarité amène alors le recruteur à favoriser les candidats qui lui ressemblent. Mais partager des points communs n’est pas un gage de bon choix. Pire, il est source de discrimination à l’embauche.”

Autre défaut et non des moindres : le CV ne permet pas d’évaluer les soft skills, des compétences humaines cognitives, émotionnelles et relationnelles qui sont aujourd’hui indispensables en entreprise. La dernière étude du World Economic Forum a d’ailleurs listé le top 10 des compétences (hard et soft skills) les plus importantes à posséder à l’horizon 2027, et la majorité d’entre elles sont des savoir-être comme la pensée analytique, le leadership, la gestion du stress ou la résolution de problèmes complexes.

C’est pour ces raisons que de plus en plus d’entreprises comme Gentis font le choix de recruter sans CV.

Quels sont les bénéfices à recruter sans CV ?

Si le CV a des limites, peut-on pour autant dire que recruter sans CV est une bonne idée ? Pour Stéphanie Reniers, les avantages sont nombreux :

“Avec le CV, les entreprises évaluent les candidats sur la base de l’expérience professionnelle antérieure, sans tenir compte de leur potentiel futur. Or, dans un monde VUCA où les transformations en entreprise sont légions et que les compétences techniques sont rapidement obsolètes, recruter sans CV permettrait de contourner ces obstacles. Sans CV, le recrutement se concentre sur les compétences réelles des candidats et leurs aptitudes à évoluer dans l’entreprise.”

Aussi, en s’affranchissant du CV, on ouvre l’accès aux postes à des profils atypiques et diversifiés. Une démarche positive pour l’entreprise puisque selon une publication du Bureau International du travail datant de 2019, les dirigeants qui mettent en place une politique d’inclusion forte ont 60% de probabilités en plus de voir leurs profits augmenter et d’attirer de nouveaux talents. Et selon un rapport Deloitte sur les tendances RH, 80% des dirigeants pensent que la diversité est un avantage compétitif puisqu’elle serait vectrice d’innovation, de créativité et de tolérance.

En l’absence de CV, comment faire ? Plusieurs initiatives se développent pour évaluer les candidatures et recruter les bons talents.

Recrutement sans CV : quelles alternatives choisir ?

Les outils d’identification et d’évaluation des compétences techniques

Finalement, le moyen de trouver la bonne personne pour le poste à pourvoir n’est-il pas de tester les hard skills ? De plus en plus d’entreprises intègrent des mises en situation et des tests techniques pour trier les candidatures comme ceux proposés par TestGorilla. De la comptabilité, au marketing de croissance en passant par le développement web, l’objectif est de recruter sur les compétences professionnelles, en évaluant les savoir-faire des candidats.

Leur force ? Ces outils ont le mérite de placer les postulants sur un pied d’égalité en donnant à tous la même opportunité de montrer ce dont ils sont capables. C’est donc une manière efficace de lutter contre les biais de recrutement.

Les tests de personnalité

Le CV ne permet pas de rendre compte des soft skills que possèdent les candidats. Pour adresser cet enjeu, des tests et questionnaires d’évaluation de la personnalité se sont développés sur le marché.

Concrètement, ces tests de personnalité proposent d’identifier et d’évaluer les qualités, les valeurs, les motivations et les comportements des individus avec ceux de l’entreprise. Les questionnaires peuvent être personnalisés de façon à aider les recruteurs à sélectionner les talents qui correspondent le mieux à la culture de l’entreprise et aux savoir-être essentiels au poste. Pour Stéphanie Reniers, si ces outils sont séduisants, attention à ne pas en faire une panacée.

Quelques conseils pour recruter sans CV

Si la formule « recrutement sans CV » est séduisante, elle ne s’improvise pas. La démarche doit être réfléchie et bien préparée, car comme le précise Stéphanie Reniers, « elle ne convient pas à toutes les entreprises ni à tous les postes. »

Pour ne pas tomber dans les mêmes écueils qu’avec le CV, il est primordial de distinguer les compétences essentielles du poste de celles qui sont souhaitables pour construire les épreuves de mise en situation, les cas pratiques et les questionnaires de compétences. Avoir une idée précise du candidat idéal est aussi important pour se reposer sur une grille d’évaluation des aptitudes et des qualités.

Enfin, toutes les personnes qui sont amenées à participer au processus de recrutement doivent être formées à recruter sans CV. « Il faut bien comprendre que changer sa manière de recruter prend du temps. » précise Stéphanie Reniers. Un temps qu’il est important de prendre pour réellement percevoir les bénéfices du recrutement sans CV.

En conclusion, recruter sans CV est une stratégie gagnante pour tout le monde. Elle permet de proposer une expérience candidat différenciante et plus juste. Côté entreprise, les erreurs de recrutement diminuent, ce qui fait du bien à la santé économique et à l’image de la marque employeur!